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La transmission du Journal d'Havre-Vif

11ème journée d’Armil 489
Caravane Havre-Vif

Apparemment je dois continuer ce Journal, jusqu’à peu c’était Perdouan qui l’avait.

Malheureusement le froid lui a fait pousser son dernier souffle il y a quelque jours.

Vu que je ne parviens jamais à me rendre utile dans notre caravane, les autres ont décidé que c’était à mon tour de le tenir à jour.

Quand on y pense, c’est une drôle de coutume ce journal.

Et à ma connaissance notre caravane est la seule à gérer son journal de bord comme le journal intime des caravaniers qui se succèdent à la plume de ces pages.

Quand je relis les premières lignes rédigées par son premier propriétaire, ça me réchauffe toujours le coeur :

“Je ne sais pas exactement pourquoi j’ai commencé à tenir ce journal. Du continent, je n’ai connu que la domination de L’Empire d’Or. Je suis né sous son joug, comme mes parents avant moi, et je mourrai probablement dans les mêmes conditions.

J’essaye pourtant de garder l’espoir que “Havre-Vif” ne soit pas seulement le nom de notre caravane mais également une promesse. Comme beaucoup d’autres qui endurent les mêmes vies sombres et rares de joies, je veux croire que la route accueille ceux qui s’y jettent.

Beaucoup sont restés trop longtemps éloignés des feux de camps et des chants des bardes. Ils ont oublié que les vivants étaient jadis l'âme de Tanak qui danse sur elle même. Coincés dans leurs villes aux noms oubliés et à la gloire passée, ils ont accepté de vivre avec la mort sur le pas de la porte.

Sur les routes, elle nous court tous après, prenant parfois des formes grotesques ou le visage d’un ami. Mais tant qu’on continue à voyager, on a l’impression de pouvoir lui échapper. Comme si ça nous donnait une chance de ne pas finir dans un de ces cimetières dont on ne revient plus.

Si tous les chemins pouvaient mener au même feu de camp, juste une fois. Alors, pour quelques nuits peut-être, nous n’aurions plus peur. Suffisamment longtemps que pour tisser des liens. Ensemble, gens de la route, nous serions assez pour repousser tous les loups et les brigands du continent s’il le fallait, qu’ils soient morts ou vifs.

Peut-être même serions nous assez que pour changer le monde...”

Ça devait être un type bien. En tout cas ses compagnons de route de l’époque l’estimaient assez que pour continuer son travail jusqu’à ce qu’il me revienne aujourd’hui. Et pas seulement le classique journal de bord de toute caravane bien organisée. Non non, jusqu’à leur décès, ils ont également tous continué à recueillir des témoignages sur les routes.

Moi qui ne suis pas à l’aise avec les inconnus me voilà dans de beaux draps. Comment vais-je bien pouvoir aller récolter les histoires de nos rencontres sur les routes alors que j’ose à peine dire bonjour aux autres caravaniers ? Je pense que dans un premier temps je me consacrerai surtout aux histoires de notre propre caravane, jusqu’à ce que je trouve le courage de plus. J’espère que le suivant sera meilleur que moi.

Cette coutume d’héritage a une drôle de façon de me renvoyer à l’idée de mon propre trépas à venir. Le plus tard possible je l’espère...

Patte de Mouche, caravanier du Havre-Vif.

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